Handicap : graves dysfonctionnements dans les ESMS belges accueillant des Français

On dénombre actuellement 8 200 personnes – dont 1 200 enfants –accueillies en institution en Belgique, faute de places.

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Un rapport de la Cour des comptes pointe le manque de contrôle dans les établissements médico-sociaux belges, où s’expatrient des milliers de « sans solution » hexagonaux.

C’est la première fois que la Cour des comptes se penche sur ce sujet épineux : des centaines de Français en situation de handicap partent chaque année vers des établissements médico-sociaux wallons (Belgique), faute de places sur le territoire national. On dénombre actuellement 8200 personnes – dont 1200 enfants –accueillies en institution de l’autre côté de la frontière. Un coût pour les finances publiques françaises évalué à 0,5 milliards d’euros par an.

Parmi les publics contraints de taper à la porte de structures belges, il y a une surreprésentation de personnes ayant le moins accès aux établissements ou services médico-sociaux (ESMS) en France. Parmi ces « sans solution », beaucoup souffrent de troubles du comportement, associés à un handicap psychique ou à une déficience intellectuelle, ou vivent des situations de ruptures de parcours (passage à l’âge adulte sans place dans les ESMS, perte de son proche aidant, etc).

Moratoire sur les départs

Le rapport rappelle les mesures prises par les pouvoirs publics pour contenir la progression constante à la fois des expatriations outre-quiévrain et des dépenses : un moratoire sur les départs des adultes, figeant l’offre à la date du 28 février 2021, et le déblocage d’une enveloppe de 90 millions d’euros au bénéfice de trois régions particulièrement en tension (Grand Est, Hauts-de-France et Ile-de-France). Cette somme aurait financé près de 1800 « solutions alternatives au départ », essentiellement des places de services à domicile ou d’hébergement temporaire.

Mais là où le rapport de la Cour des comptes est potentiellement explosif, c’est qu’il pointe de graves dysfonctionnements au sein des dispositifs de contrôles dans les établissements wallons. Grâce à une enquête menée conjointement par l’Aviq (Agence pour une vie de qualité) belge et par l’ARS des Hauts-de-France, il y aurait aujourd’hui une vingtaine de structures accueillant des Français en situation de handicap qui seraient concernées par ces manquements. Et depuis 2015, ce serait une soixantaine d’établissements qui se seraient livrés à des maltraitances physiques ou verbales.

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Privation de nourriture, défaut de soins pouvant conduire au décès, denrées alimentaires avariées, bâtiments mal entretenus ou vétustes, défaut de surveillance avec mise en danger… La liste des atteintes graves sur personnes vulnérables fait froid dans le dos. La Cour des comptes « appelle les autorités françaises à une plus grande vigilance sur la qualité et la sécurité de la prise en charge de ces résidents », estimant « qu’en l’état, cette condition n’est pas partout garantie ».

La Cour des comptes adresse 10 recommandations parmi lesquelles :

  • Recenser et suivre tous les enfants hébergés dans les établissements wallons accueillant des enfants en situation de handicap, quel que soit le financeur de leur séjour ;
  • Recenser les situations d’enfants relevant de l’Ase et disposant d’une orientation MDPH, pour que leurs séjours soient pris en charge par l’assurance maladie ;
  • Allouer les crédits du plan « 50 000 solutions » selon une logique de rattrapage pour les départements les moins bien dotés en ESMS ;
  • Créer une nouvelle plateforme franco-belge, en partenariat avec les autorités wallonnes, permettant aux opérateurs des inspections d’accéder à l’ensemble des documents (rapports, décisions d’agréments, notes financières…).

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>>> Retrouvez ici l'intégralité du rapport de la Cour des comptes