Grève chez Domidom : « Nous ne voulons pas travailler à perte »

Dix salariées de l’agence de services et d’aide à domicile Domidom (qui appartient au groupe Orpea), à Caen (Calvados), sont en grève depuis le 18 octobre. Le point sur leurs revendications avec Séverine Marotel, auxiliaire de vie et référente qualité.

Actualités sociales hebdomadaires - Pour quelles raisons avez-vous entamé une grève depuis le 18 octobre ?

Séverine Marotel : La première des revendications est une hausse des salaires. Nous ne sommes concernées par aucune des dernières mesures prises : nous n'avons toujours pas touché la prime Covid et nous sommes exclues du Ségur de la santé et de l'avenant 43. Quel que soit notre grade (du niveau 1 à 4), que nous ayons un diplôme ou non, de l’expérience ou non, nous sommes toutes à 11,07 euros de l’heure, soit 1 309 euros nets par mois. Et tout cela alors que nous travaillons de 7h00 à 21h00, les week-end et jours fériés. Nous demandons donc une augmentation de 20%, soit 1 500 euros nets par mois. Nous réclamons aussi une revalorisation de l'indemnité de frais kilométriques. Actuellement, elle est de 31 centimes d’euros mais seule la distance parcourue entre deux bénéficiaires est remboursée. Les kilomètres de notre domicile à celui du premier bénéficiaire ne sont pas défrayés, et inversement pour le dernier bénéficiaire

Vous devez donc payer de votre poche...

Oui, et nous avons encore trop de frais. En plus de l’essence, nous prenons à notre charge l’entretien des véhicules, les paniers-repas ou encore les stationnements (un euro de l'heure). A la fin du mois, il faut faire des choix, et c'est souvent l'horodateur qui saute, avec le risque de prendre une amende de 33 euros. C’est pourquoi nous voulons une prime de panier-repas de 10 euros, une majoration des heures supplémentaires à 25% contre 10% actuellement. Nous souhaitons aussi que l'employeur finance une prévoyance collective car, actuellement, nous ne sommes pas couvertes en cas d'accident de travail. Enfin, nous demandons un 13ème mois ou une prime d’assiduité.

Où en êtes-vous des négociations avec votre direction ?

En fin de semaine dernière, nous avons eu des premières propositions. Si elles vont dans le bon sens avec une revalorisation des frais kilométriques à 45 centimes d’euros, pour le reste elles sont largement insuffisantes. Les salaires passeraient à 11,11 euros de l’heure pour le niveau 1, 11,20 euros pour le niveau 2, 11,42 euros pour le niveau 3 et 11,69 euros pour le niveau 4, soit des hausses de 1 à 5%. Nous sommes donc très loin de nos revendications. Pour se justifier, la direction assure que les caisses sont vides. Concernant la prévoyance, notre employeur doit discuter avec des assureurs. Le temps de la négociation, elle ne pourrait être mis en place qu’à la fin du premier semestre 2023. Par ailleurs, la direction estime qu’il n’est pas de son ressort de nous accorder des paniers-repas mais que cela doit être négocié au sein du CSE. Nous n'avons pas eu de réponse sur le paiement des heures supplémentaires à 25% tout comme le 13ème mois.

Après presque un mois de grève, comment envisagez-vous la suite ?

Nous avons échangé avec la direction lundi 14 novembre, rien n'a évolué. Nous continuons donc le mouvement. Nous réfléchissons à une éventuelle saisine des prudhommes afin de faire valoir nos droits. Mais la situation nous désole, nous ne voulions pas en arriver là. C’est juste que nous n'en pouvons plus. Nous aimons notre métier mais nous ne voulons pas travailler à perte. Nous sommes en souffrance. Certaines personnes sont en arrêt parce qu'à la fin du mois elles n'ont plus les moyens de remplir leur réservoir d'essence. Ce n’est plus possible.

 

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Auteur

  • PROPOS RECUEILLIS PAR MAXIME RICARD