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Ehpad publics en résistance : Pas question "d'être dans le tome 2 des Fossoyeurs"
Après un an de mobilisation, il manque toujours 10 à 12 milliards d’euros pour remettre à flot le secteur.
Crédit photo Anke Thomass - stock.adobe.com
Engagés dans un bras de fer contre l’Etat depuis un an, les maires bretons ont reçu le soutien des départements. Ils dénoncent le non-respect des droits fondamentaux des résidents d’Ehpad.
Il y a un an, une centaine de communes bretonnes sonnaient l’alerte et annonçaient leur intention d’attaquer l’Etat en justice pour carence fautive sur le financement des Ehpads et non-respect des obligations de soin. Cette procédure inédite visait à contraindre leurs autorités de tutelle à l’action alors que 85% des Ehpads publics sont aujourd’hui déficitaires, notamment ceux gérés par les CCAS.
Un chiffre record alarmant selon la Fédération hospitalière de France. Réunis au sein du collectif Ehpad publics en résistance. les maires bretons font tous le constat d’un vrai problème structurel de financement. Lequel se situe bien delà de la situation inflationniste et nuit gravement au fonctionnement des établissements. Mais aussi va à l’encontre de la santé des résidents et du respect de leurs droits fondamentaux.
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Après un an de mobilisation et d’échanges avec le ministère, l’ARS et les départements, la situation est malheureusement toujours aussi critique. Il manque toujours 10 à 12 milliards d’euros pour remettre à flot le secteur. Sans compter que la loi Grand âge sans cesse annoncée comme une priorité est toujours renvoyée aux calendes grecques.
En avril 2024, en réponse aux grosses difficultés financières, le gouvernement avait annoncé affecter 650 millions d'euros aux Ehpads, dont 190 millions pour les établissements publics. « On n’en a pas vraiment vu la couleur », se désole Jean-Louis Even, maire de la Roche-Jaudy (Côtes d’Armor) et porte-parole du collectif. Bien décidés à aller jusqu’au bout, les édiles ont déposé le 15 juillet, à Fadila Khattabi, ministre déléguée chargée des personnes âgées, ainsi qu’à l’ARS et aux départements bretons, 16 dossiers de demandes d’indemnités préalables pour un montant cumulé de 7 millions d’euros. A la suite de quoi des concertations ont eu lieu.
Changer de modèle
Si aucun accord n’a été trouvé avec l’Etat et l’ARS, les départements bretons, eux, ont décidé d’apporter leur soutien à l’action du collectif. Ils produiront un mémoire en tant qu’observateurs.
« Comme nous ne sommes pas gestionnaires d’établissements, nous ne pouvons pas engager d’action juridique », explique Véronique Cadudal, vice-présidente déléguée à l’Autonomie au Conseil départemental des Côtes d’Armor. Selon elle, « il faut rapidement changer de modèle ». Le système actuel ne fonctionne plus et les départements déjà en difficulté financière sont à court de solutions.
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« Nous avons utilisé tous les leviers dont nous disposions. Toutes nos démarches et les millions d’euros supplémentaires que nous avons débloqués ne suffisent pas », s'alarme la vice-présidente. Faute de réponse de l’Etat, les dossiers sont dorénavant dans les mains des juges du tribunal administratif. A terme, ce sont une cinquantaine de communes et de CCAS qui pourraient se joindre au recours contentieux.
Etendre la lutte
Afin d’étendre le combat au-delà du territoire breton, et agréger les différents acteurs concernés par le problème au niveau national, le collectif s’est constitué en association. Son nom : Territoires en résistance pour le Grand âge. Pour Jean-Louis Even, il y a urgence à agir. « Quand on voit ce qui se passe dans certains Ehpads où les résidents ne sont pas levés, ni changés... ce sont pourtant des êtres humains ! Si on faisait la même chose à des animaux, on aurait des problèmes. Nous ne voulons pas être les acteurs du tome 2 des Fossoyeurs ».
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