EDITO - Aides à domicile : une journée nationale, et après…

En avril 2021 ? des aides à domicile manifestaient à Paris pour réclamer des meilleures conditions de travail

Crédit photo Riccardo Milani / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Bon d’accord, il y a des journées nationales pour tout et n’importe quoi, on ne devrait même plus s’en offusquer. Mais il en manquait une au box-office : celle des aides à domicile. C’est désormais chose faite le 17 mars. Le ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées s’est fendu d’un communiqué de presse pour annoncer cette première. Normal, c’est lui qui a décidé d’honorer ces professionnels ce jour-là pour les remercier de leur engagement et « mettre en valeur la place essentielle qu’ils ou elles tiennent dans notre solidarité nationale ».

Grâce à elles - 96% sont des femmes -, la France réussirait son « virage domiciliaire ». Ben tiens. Vieillir chez soi, tout le monde en rêve paraît-il. Vu l’univers impitoyable des Ehpad et l’abandon d’une loi « grand âge », guère étonnant. On se demande d’ailleurs si ce n’est pas fait exprès ! Mais c’est une autre histoire. Quoique. Toujours est-il que l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Ironie du sort, un livre sur les mauvaises conditions de travail du secteur vient pile de paraître : « Aide à domicile, un métier en souffrance » (Ed° de l’Atelier).

Des salaires « parmi les plus bas de tous les métiers »

Ça n’a rien d’un scoop mais une des raisons du mépris envers cette profession tient à l’idée que n’importe qui pourrait l’exercer. A fortiori les femmes dont les compétences naturelles pour aider les autres sont bien connues. Sauf qu’aujourd’hui, les aides à domicile sont professionnalisées. Pourtant, leurs salaires « restent parmi les plus bas de tous les métiers », écrivent les auteurs. Et majoritairement inférieurs au Smic. En raison d’un travail à temps partiel, certes, mais qui, en réalité n’en n’est pas un. Leurs journées sont si fragmentées qu’elles commencent souvent à 7 h du matin et se terminent à 20 h le soir. Le tout pour la coquette somme de 1 000 euros en moyenne par mois. Sans compter la pénibilité : ça n’y paraît pas de loin mais faire des toilettes, du ménage, déplacer des charges lourdes, conduire entre chaque intervention… génèrent un des plus grands nombres d’accidents et de maladies professionnels du monde du travail.

Alors oui, comme d’autres métiers du lien et du soin, les aides à domicile méritent d’être reconnues et valorisées. Concrètement et dignement. En attendant, celles qui sont considérées comme des marchandises interchangeables et bon marché seront sans doute bien contentes de jouir d’une journée nationale inscrite ad vitam aeternam sur les éphémérides et de deux affichettes et trois vidéos valorisant leur rôle. Reconnaissance éternelle.

Auteur : BRIGITTE BÈGUE