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Du polyhandicap à l'autisme, à chacun son sport (3/5)
La Boutique solidarité de la Fondation Abbé-Pierre, à Reims, possède sa propre salle de sport, ouverte aux plus précaires.
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- Autisme - Personnes handicapées - Enfant en situation de handicap - Hauts-de-Seine - La Réunion - Rhône
[ENQUÊTE] Aux quatre coins de l'Hexagone, des professionnels développent des programme sportifs auprès des personnes en situation de handicap. Troisième volet de notre enquête, avec des initiatives menées à Vaucresson, à La Réunion et à Villeurbanne.
Par-delà le polyhandicap
Habituellement, on n’associe pas la pratique d’une activité physique avec le polyhandicap. Pourtant, l’établissement Quelque Chose en plus, à Vaucresson (Hauts-de-Seine), prouve le contraire. Cette structure qui accueille 15 enfants et adolescents âgés de 5 à 20 ans atteints de polyhandicap défie les préjugés en misant sur davantage d’activités physiques pour l’ensemble de ses jeunes résidents.
Le credo de Kristell Bouaziz, la directrice : permettre à chaque jeune résident de développer une activité sportive de manière régulière et durable. Sa première initiative a été de doubler le temps d’intervention de l’éducateur sportif, un prestataire extérieur, qui exerce depuis dix ans au sein de la structure. « Chaque jeudi, il intervient deux heures supplémentaires auprès de nos jeunes, hors de notre structure, dans le gymnase que la ville nous prête pour l’occasion, grâce à une convention que nous avons signée », annonce-t-elle.
Vecteur de rencontres
L’espace multisport est équipé de grands tapis, de poutres, d’arceaux, etc. Tout le matériel nécessaire pour explorer une autre mobilité, les corps libérés des fauteuils et corsets qui les entravent et limitent leurs mouvements. Pour un après-midi, le gymnase se transforme en un immense terrain de jeu : on se roule par terre, on rampe, on touche les matières, on se remet dans sa verticalité, en toute sécurité. Tout est prétexte à remettre les enfants en mouvement, à leur permettre d’explorer et de mobiliser leur corps différemment. « Nous leur offrons l’opportunité d’élargir leurs horizons, ajoute Kristell Bouaziz, en découvrant de nouvelles sensations à travers une autre manière de bouger. Et tout cela par le jeu ! »
Ce jour-là, l’éducateur sportif est assisté par l’enseignante ainsi que des professionnels éducatifs de l’établissement. L’accompagnement s’effectue en « one to one », avec un adulte pour un jeune, afin d’aider celui-ci à marcher, de le soutenir, de le mettre au sol ou de le relever. Ces actions subtiles mettent tout le corps en jeu, permettant aux enfants de prendre appui, de solliciter leurs os, de grandir plus facilement et de gagner en mobilité. « Les enfants expriment par des rires et des sourires leur plaisir de bouger et d’être bougés », observe la directrice.
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Un autre avantage est que, « le jour où ils ont sport », les parents remarquent que leurs enfants dorment mieux. « Pour ceux qui ont des troubles du sommeil, nous avons intensifié l’effort sportif, poursuit-elle. La fatigue physique réduit leurs difficultés d’endormissement » De plus, les enfants manifestent davantage d’interactions entre eux. Cet avantage est particulièrement précieux pour les adolescents, qui ont besoin de se sentir appartenir à un groupe. « Le sport est un excellent vecteur de rencontres », remarque-t-elle.
L’expérience devient même « banale » : « La mairie ne fait plus de distinction entre les écoles, les associations sportives et nous. Elle nous demande quel créneau sportif nous souhaitons réserver pour l’année prochaine. Cela signifie que nous sommes considérés comme tous les autres établissements ordinaires », conclut-elle. La preuve que les mentalités changent, dans le bon sens.
À La Réunion, chacun son défi
« Être bien dans son corps, c’est être bien dans sa tête. » Ce mantra pourrait aussi bien être celui de la maison Pierre-Lagourgue (incluant un foyer d’accueil médicalisé et un foyer d’accueil occupationnel) que celui du foyer de vie Pierre-Rodier. Implantés sur l’île de La Réunion, ces deux établissements gérés par la fédération Apajh, qui accueillent près de 130 personnes en situation de handicap âgées de 24 à 65 ans, ont choisi de placer le sport au cœur de leur accompagnement.
Basket, rollers, judo, lutte, vélo et bien d’autres, les séances régulières, dont environ 50 % se déroulent à l’extérieur, s’effectuent en partenariat avec des associations et des clubs sportifs locaux (tennis, karaté…) ainsi que des centres équestres. Cette intégration facilite la participation sociale des résidents dans le tissu local.
Chaque semaine, 40 activités sportives se voient ainsi proposées. Pour garantir leur qualité et leur sécurité, les deux structures emploient deux éducateurs sportifs. « En collaboration avec les éducateurs spécialisés, ils adaptent les séances en fonction des besoins médicaux des résidents, minimisant ainsi les risques de blessures », explique Simon Claerbout, directeur des établissements.
Au sommet du piton des Neiges
Lorsque c’est possible, ces professionnels s’efforcent de réaliser les souhaits de chaque résident. Comme, par exemple, celui d’un homme de 45 ans dont le rêve était de gravir le piton des Neiges, sommet culminant à 3 070 mètres d’altitude. Un défi compliqué, mais réalisable ! Accompagné d’un groupe composé de quatre résidents, de trois professionnels ainsi que de son neveu et de sa nièce, il a marché pendant quinze heures, réparties sur deux jours. « Voici comment un projet personnel peut bénéficier à tout un groupe, après des mois d’entraînement à gravir plusieurs massifs rocheux de l’île », se réjouit Simon Claerbout.
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Une autre approche tout aussi prometteuse est mise en œuvre dans les deux établissements, qui disposent d’une salle de sport de 150 m2, souvent disponible en fin de journée. Le directeur a eu l’idée de la prêter gracieusement à des clubs sportifs locaux, à condition que les résidents puissent assister aux séances. L’un d’entre eux a découvert sa passion pour le karaté lors de ces cours et a exprimé le souhait de le pratiquer progressivement.
« Au début, il a intégré le groupe des enfants pour se familiariser avec la discipline, avant de rejoindre à l’extérieur le groupe des adultes. Nos équipes ont facilité cette intégration en favorisant les relations au sein du club », explique le directeur.
Au chevet des personnes autistes
Via son Sessad de Villeurbanne (Rhône), l’association AFG Autisme a lancé la plateforme « AFG Sport adapté », destinée à répondre aux besoins spécifiques des personnes autistes et de leurs familles. Face à une liste d’attente de 700 familles en quête de solutions d’accompagnement, cet outil offre une alternative, par le biais de clubs sportifs locaux adaptés.
« Les personnes autistes, avec un handicap mental ou des troubles psychiques, ressentent un fort besoin d'activité physique et sportive. Malheureusement, elles sont souvent exclues des clubs ordinaires », explique Adrien Gérinière, enseignant et chef de projet en activité physique adaptée (APA) chez AFG Autisme. Pour combler ce vide, il a créé l’interface en 2022, permettant aux familles de concevoir des projets personnalisés autour du sport adapté avec un suivi et des ajustements réguliers.
Bien plus qu’une activité physique, le sport adapté agit comme un outil de médiation favorisant le bien-être global, la gestion émotionnelle ainsi que le développement des compétences sociales et de la communication. « Pour beaucoup de nos bénéficiaires, le sport est une occasion de se faire des amis et de tisser des liens, même en cas de difficultés de communication », ajoute Adrien Gérinière.
Créer des passerelles
Afin de soutenir cette initiative inclusive, AFG Autisme a tissé un solide réseau avec des partenaires tels que les clubs sportifs locaux, le Comité paralympique et sportif français départemental (CPSF) et la Fédération du sport adapté (FSA). Les séances sont co-encadrées par des enseignants en activité physique adaptée (APA) et les entraîneurs des clubs, intégrant ainsi les bonnes pratiques issues du médico-social.
Grâce à cette collaboration fructueuse, environ 200 bénéficiaires ont intégré des clubs sportifs ordinaires, rendant l’initiative financièrement viable. « En deux ans, nous avons réussi à créer des passerelles et à intégrer nos bénéficiaires dans le tissu sportif local. C’est une réussite extraordinaire ! »
>>> Retrouver toute notre enquête :
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