Branche autonomie : l’Uniopss demande plus de place dans les instances de décision

Autonomie

"On ne peut pas décorréler l’approche domiciliaire de l’accompagnement en établissement. Pour nous, c’est une ligne rouge" prévient Daniel Goldberg, président de l’Uniopss.

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Dans la foulée de l’adoption d’un PLFSS par l’Assemblée nationale plus déficitaire que prévu par l'exécutif, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie vient de voter le dernier budget initial de sa convention d'objectifs et de gestion 2026. 

Effet domino. En adoptant mardi 9 décembre – à 13 voix près ! – le projet de financement de la Sécurité sociale pour 2026, l’Assemblée nationale a donné le go au conseil d’administration de la CNSA, l’organisme gestionnaire de sa cinquième branche, pour donner un coup de tampon sur sa propre trajectoire financière. Sans même attendre la deuxième lecture au Sénat du 12 décembre, les administrateurs de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie s’étaient donné rendez-vous en présence de leur ministre de tutelle Charlotte Parmentier-Lecocq pour adopter son budget initial pour l’année prochaine.

Un budget renforcé par une fraction de la CSG

Timing oblige, c’est sur un « budget resserré », qui devrait être corrigé début janvier en fonction des évolutions du débat parlementaire sur le PLFSS, que les administrateurs se sont entendus. Ce sera d’ailleurs le dernier voté dans le cadre de la séquence couverte par la convention d’objectifs et de gestion (COG) qui court pour la période 2022-2026 avant l’établissement de la prochaine.

Renforcé par une nouvelle ressource issue de l’octroi d’une fraction de la CSG sur les revenus du capital d’environ 1,5 milliards d’euros, ce budget doit notamment permettre à la CNSA de poursuivre sa politique de transformation de l’offre médico-sociale engagée plusieurs années en amont.

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Dans ce cadre, la maquette financière prévue pour 2026 comprend notamment une enveloppe de 85 millions destinée à soutenir les investissements immobiliers, RH et techniques des ESMS, des ARS et des organismes gestionnaires, un investissement de 100 millions pour l’habitat intermédiaire (dont 47,8 millions pour les seules résidences autonomie) ou un soutien de 11,5 millions aux MDPH dans le cadre du « Tour de France des solutions ».

Autant d’investissements qui s’inscrivent dans le cadre du déploiement des services publics départementaux de l’autonomie (SPDA) et auxquels s’ajoutent d’autres enveloppes dédiées au plan de formation des établissements pour le grand âge et le handicap, le soutien à la transition énergétique et environnementale des établissements… et la réduction du déficit de la CNSA (estimé à près d’1,5 milliards).

"Aller plus loin dans la représentation des personnes au CA de la CNSA"

Fin de COG oblige, 2026 doit également voir le départ de l’actuel président de la Caisse, Jean-René Lecerf, et la désignation d’une nouvelle équipe dirigeante. L’occasion, peut-être, de voir le conseil d’administration de l’institution, aujourd’hui largement dominé par les représentants de l’Etat et des départements, s’ouvrir plus largement à la parole de la société civile et du monde associatif qui, aujourd’hui, se sentent un peu relégués en bout de table. C’est en tous cas le vœu que formulait l’Union nationale interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss) à l’occasion d’un wébinaire sur la trajectoire de la Sécurité sociale organisé le 12 décembre.

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« Actuellement, la direction de la CNSA n’est pas un véritable conseil d’administration. Il faut aller plus loin dans la représentation des personnes au sein de la gouvernance », observait Etienne Petitmengin, président de la commission « Autonomie » de l’Union. Une ambition qui vaut aussi bien à l’échelon national qu’à celui des départements où les acteurs associatifs et les porte-paroles des usagers se sentent parfois étouffés par le carcan « techno » des conseils départementaux. « Les autorités départementales nous consultent en amont de leur prise de décision parce qu’elles ont obligation de le faire… mais sans toujours tenir compte de la parole portée », résume Aude Brard, directrice adjointe de l’Uriopss Centre.

Lignes rouges

Dans ces conditions, le nouvel acte de décentralisation promis par Sébastien Lecornu – qui vient de mandater l’Igas et l’IGF le 11 décembre pour une mission préparatoire au futur projet de loi – constitue aussi une source d’inquiétude pour les représentants de la société civile : « Le Premier Ministre veut confier l’accompagnement du domicile aux départements alors que l’Etat s’occuperait des établissements. Cela reviendrait à cloisonner l’action publique alors qu’il faudrait au contraire la décloisonner sans créer de silos supplémentaires. On ne peut pas décorréler l’approche domiciliaire de l’accompagnement en établissement. Pour nous, c’est une ligne rouge » prévient Daniel Goldberg, président de l’Uniopss.

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Une ligne rouge, mais pas la seule. Le PLFSS voté par l’Assemblée le 10 décembre devrait se traduire par un déficit annoncé pour la Sécurité sociale de 19 milliards d’euros en 2026. Et cette question du maintien de la soutenabilité financière à terme du régime préoccupe également l’Uniopss. Surtout à une époque où l’idée de réformer en profondeur un système de solidarité collective perçu pour y introduire des éléments de capitalisation fait son chemin dans le discours public.

Egoïsme générationnel

Trop de dépenses, pas assez de recettes… L’équilibre demeure acrobatique à trouver. Quoi qu’il en soit, « on ne peut pas éternellement faire reposer la soutenabilité du régime sur la dette, même si c’est un discours que l’on entend même désormais porté par certains acteurs associatifs. La dette, c’est de l’égoïsme générationnel puisqu’on transmet la facture aux générations futures », juge Dominique Libault, l’ancien patron de la Sécurité sociale qui plaide aujourd’hui en faveur de programmations pluriannuelles pour les dépenses sociales, afin d’en dresser des trajectoires de plus long terme qu’une simple loi annuelle.

L'équation n’est pas simple. Elle devrait d’ailleurs constituer le cœur des débats du prochain congrès de l’Uniopss organisé en mars-avril 2026. L’Union devrait à son issue publier ses pistes pour pérenniser le régime de la Sécurité sociale.

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