Pourquoi le taux de chômage des personnes handicapées a-t-il poursuivi sa hausse en 2024 ?

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Le nombre de chômeurs handicapés a bondi de 8 % entre 2023 et 2024.

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Si l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées) estime que cette augmentation est – en partie – portée par celle du nombre de travailleurs reconnus handicapés, d'autres raisons sont à chercher du côté des entreprises assujetties à l’obligation d’emploi...

Faute du retour d’une croissance qui se fait toujours attendre, les chiffres du chômage repartent à la hausse et les publics les plus fragiles font les frais de cette frilosité du marché de l’emploi. Conséquence croisée de la dégradation de la situation économique générale, des premiers effets d’une réforme des retraites qui a allongé la durée du travail, mais aussi de l’augmentation du nombre de personnes bénéficiant d’une reconnaissance administrative de leur handicap (ils étaient en tout 3,3 millions), le taux de chômage des personnes handicapées a poursuivi en 2024 sa progression entamée depuis la mi-2023, comme l’indique le tableau de bord annuel de l’emploi handicapé dévoilé par l’Agefiph début juillet 2025.

Un taux de chômage qui bondit

Résultat de cette hausse constante, le nombre de personnes en situation de handicap au chômage dans les trois catégories A, B et C a fait un bond de 8 % tout au long de l’année 2024 (contre « seulement » + 2,3 % pour les demandeurs d’emploi valides), pour atteindre fin décembre le nombre de 512 598 chômeurs au statut DEBOE (demandeur d’emploi bénéficiant de l’obligation d’emploi) inscrits à France travail. Au total, à la fin de l’année dernière, le taux de chômage des personnes handicapées s’élevait à 12 % (7,4 % pour les valides). Par ailleurs, sur l’ensemble de ces demandeurs d’emploi reconnus DEBOE, 54 % étaient considérés comme chômeurs de longue durée (plus d’un an sans emploi).

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Dans le même temps, cependant, 209 598 DEBOE avaient été embauchés cette même année (soit une augmentation de 2 % en un an) et 26 684 maintenus dans l’emploi (+ 9 % par rapport à 2023) grâce à l’intervention des équipes Cap emploi auprès de leurs employeurs. Parmi ces derniers, une très nette majorité de femmes (62 %).

Portrait-robot

Les données de l’Agefiph permettent de dresser le portrait-robot du demandeur d’emploi bénéficiant de l’obligation d’emploi en 2024 : il s’agit majoritairement de femmes (54 %), âgées de 50 ans et plus (51 %), dont 35 % travaillent à temps partiel et qui pour seulement 35 % appartiennent à la catégorie des cadres et des professions intermédiaires. A noter que 50 % disposent d’une qualification de niveau baccalauréat ou plus et 19 % inférieure à un CAP.

A contrario, les hommes étaient majoritaires (52 %) parmi les 674 400 personnes handicapées bénéficiaires de l’OETH (reconnaissance du statut de travailleur handicapé) au sein des 31 % d’entreprises assujetties à l’obligation d’emploi des personnes handicapées et y répondant par des embauches directes (c'est-à-dire sans recourir au secteur protégé en sous-traitance). Au total, l’Agefiph note qu’en 2024, 30 % des entreprises soumises à cette obligation d’emploi n’y satisfaisaient pas et ne faisaient pas davantage appel au secteur protégé en compensation.

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Comme l’an passé, une part non négligeable des DEBOE se concentre sur seulement trois secteurs d’activité : le support à l’entreprise (12,5 %), les arts (12,5 %), l’installation et la maintenance (12,2 %), soit près de 40 % de l’effectif total. Côté prestations de solidarité, 25 % des DEBOE bénéficiaient en 2024 de l’allocation aux adultes hancidapés (AAH), soit 129 336 personnes, et 13 % du revenu de solidarité active (RSA), 67 820 personnes.

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Moins d'entrées en formation, un peu plus en apprentissage

En 2023, 100 950 demandeurs d’emploi en situation de handicap étaient entrés en formation, soit près de 10 000 de moins que l’année précédente (- 8 %) mais dans le contexte d’un recul général de l’accès des chômeurs à la formation, valides compris, toutes catégories confondues (- 16 %). Les publics concernés étaient plutôt féminins (53 %), jeunes (61 % ont moins de 50 ans), peu diplômés (57 % étaient de niveau infra-bac) et récemment inscrits à France travail (73 % l’étaient depuis moins d’un an). 36 % suivaient une formation certifiante (contre 48 % des valides) et 31 % bénéficiaient plutôt d’une action de remise à niveau (contre 16 % des autres publics).

En 2024, 15 713 personnes en situation de handicap étaient inscrites en contrat d’alternance (14 409 en apprentissage, 1 304 en contrat de professionnalisation), en progression de 12 % par rapport à l’année précédente. Au total, 1,8 % des travailleurs handicapés étaient en alternance cette année-là, en légère croissance par rapport à 2023. Plutôt masculine (57 %), la population alternante était âgée en moyenne de 25,5 ans en début de contrat et préparait à près de 60 % des diplômes post-bac relevant à 74 % du secteur tertiaire. 42 % effectuaient leur alternance dans une très petite entreprise de moins de 10 salariés. En revanche, le taux de rupture de ces contrats, c'est-à-dire d’abandon avant la fin du cursus, restait toujours supérieur à celui des personnes valides (21 % contre 16,4 %).

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