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Handicap : des milliers d’enfants sans solution pour la rentrée 2025

Autonomie
D'après l’enquête menée par l'Unapei, 13 % des 3 603 enfants de 3 à 16 ans accompagnés dans les établissements médico-sociaux de son réseau n’ont aucune heure de scolarisation par semaine.
Crédit photo Maryna - stock.adobe.com
A une semaine de la rentrée scolaire, l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei) publie des chiffres sur le nombre d’enfants en situation de handicap laissés pour compte. Edifiant.
« Ce sont des chiffres alarmants », martèle Florence Perret, administratrice et porte-parole de l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei). « Comment peut-on entrer dans les apprentissages si on a une à deux heures de scolarisation par semaine ? Comment peut-on seulement apprendre à lire et à écrire ? »
Faute de données officielles, le réseau Unapei a mené l’enquête auprès de 38 associations qui représentent 3 603 enfants de 3 à 16 ans accompagnés dans les établissements médico-sociaux. Résultat : 13 % n’ont aucune heure de scolarisation par semaine, 38 % ont entre 0 à 6 heures, 30 % ont entre 6 à 12 heures et 19 % ont plus de 12 heures. Sans compter les plus de 4 400 enfants inscrits sur liste d’attente d’un établissement ou structure comme un institut médico-éducatif (IME) ou un institut thérapeutique, éducatif et pédagogique (Itep).
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« Dans les établissements médico-sociaux, ce sont des enseignants détachés de l'Education nationale qui sont chargés de la scolarité. Mais aujourd’hui, on fait face à une multiplication des dispositifs qui entraîne le glissement de certains enseignants spécialisés d'un dispositif à un autre sans être remplacés. On observe aussi des difficultés de coopération entre le médico-social et l'Education nationale », analyse Florence Perret.
En milieu ordinaire, une inclusion impossible
Au sein de l’enquête, 30 associations ont également répondu pour 1 462 enfants scolarisés en milieu ordinaire. Parmi eux, seuls 38 % ont reçu une notification AESH (accompagnant d'élèves en situation de handicap). « Et quand bien même ils en ont une, elles sont de plus en plus souvent mutualisées entre plusieurs élèves », déplore la porte-parole du réseau associatif. Et pour cause : en 2024, les AESH étaient un peu plus de 140 000 – correspondant à 88 502 équivalents temps plein (ETP) – pour 519 000 élèves en situation de handicap. « Il y a eu des efforts, mais ce sont trop souvent des bouts d’inclusion, plus qu’une inclusion réelle. Il y a encore trop d’enseignants qui ne sont pas formés, des classes surchargées et des AESH sous-valorisées. Dans ce contexte, l'accessibilité à l'éducation et à la scolarisation n'est absolument pas garantie. »
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D’autres enfants en situation de handicap ne trouvent tout simplement pas leur place en milieu ordinaire. D’après l’enquête, sur les élèves ayant reçu une notification AESH, 27 % l’ont eue par défaut, en attendant une solution adaptée (IME, place en classe Ulis [unité localisée pour l'inclusion scolaire…]. C’est le cas de Matthias, 13 ans, porteur d’un trouble du spectre autistique et sur liste d’attente de plusieurs IME depuis cinq ans. « Il a passé toute sa primaire en dispositif Ulis, dans une classe d'environ 12 élèves avec des niveaux scolaires différents, explique sa mère Angélique. Chaque élève avançait à son rythme avec un programme adapté. Malheureusement, pour bénéficier de ce dispositif, il faut que l'enfant soit en capacité de faire des inclusions en classe normale. Pour Mathias, ce n'était pas possible à cause du bruit et de l'effectif des classes. Du coup, la classe Ulis lui a été refusée par la MDPH [maison départementale pour les personnes handicapées] pour son entrée en 6e. On nous a alors orientés vers une classe ordinaire, avec une notification d’AESH à 100 %… mais il n'y a pas d'AESH. Et dans tous les cas, il n’aurait pas supporté, entre le changement de classe et de professeur toutes les heures, le bruit, la récréation… »
Non-choix
Angélique et son mari se retrouvent face à un « choix » intenable : déscolariser leur fils ou le maintenir dans un environnement inadapté, au risque de grandes souffrances pour lui. Ils décident donc de le scolariser à domicile, via le CNED, avec un soutien des professionnels du Sessad (service d'éducation spéciale et de soins à domicile). Angélique arrête de travailler et, pour la deuxième année consécutive, se consacre entièrement à Mathias. « C’est une lourde responsabilité et ce n’est pas l'idéal pour sa socialisation, mais à mes yeux, le bien-être et les progrès de mon fils passent avant tout. »
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Son cas n’est pas unique. En 2023, le gouvernement indiquait qu'au moins 11 000 enfants étaient en attente d’une place en institut médico-éducatif. « Mais on manque justement de chiffres. Or sans données fiables, on ne peut pas mettre en face les moyens financiers, humains, organisationnels et structurels adaptés », abonde Florence Perret, qui rappelle que depuis plusieurs années, l’Unapei demande la création d'un observatoire des besoins des personnes handicapées.