Vous êtes ici
"On est des petits pantins, on nous trimballe sans nous concerter"

Autonomie
La suppression des aides régionales pourraient avoir des conséquences sur l’aménagement PMR des logements ou des véhicules adaptés, ainsi que sur la diffusion de la communication alternative et améliorée.
Crédit photo Pete - stock.adobe.com
La région Ile-de-France a décidé de stopper le versement de 2 millions d’euros aux fonds de compensation du handicap gérés par les MDPH. Une décision critiquée entre autres par APF France handicap.
La polémique enfle autour de la suppression de 2 millions d’euros d’aides que la Région Ile-de-France versait chaque année aux fonds départementaux de compensation du handicap. Le sujet est revenu sur la table en commission permanente, jeudi 25 septembre, après une première levée de boucliers de l’opposition de gauche dans un communiqué le 19 septembre dernier. « Cette décision est inacceptable, incompréhensible, injuste », répète l’élue du groupe de gauche communiste écologiste et citoyenne, Céline Malaisé, appelant l’exécutif régional à revenir à la « raison ».
>>> A lire aussi : Ce maillon manquant en matière de transport d’enfants handicapés
Plusieurs élus de différents bords politiques ont à leur tour contesté cette décision. Des différents groupes de gauche jusqu’au centre et l’extrême droite. « Nous avons parfois soutenu des mesures d'économie mais celle-ci nous interroge particulièrement », souligne Pierre-Jean Baty, membre de la majorité présidentielle, qui a porté la parole d’une membre de son propre groupe, mère d’enfants en situation de handicap attachée au soutien de la MDPH. « Vous faites les poches des familles qui en ont le plus besoin», lance la conseillère régionale de la France insoumise, Julie Garnier. « C’est le dernier secteur où aller chercher des économies », déclare Aymeric Durox, élu du Rassemblement national.
Arrêt des fonds dès 2025
Depuis 2014, la Région Ile-de-France abonde ces fonds à hauteur de 10 à 15% de leurs ressources. Fonds départementaux qui bénéficieraient à quelque 2.000 personnes chaque année, selon le chiffre communiqué par le groupe de gauche communiste. Ce vendredi, celui-ci a lancé une pétition pour obtenir le retrait de cette mesure permettant d’alléger le reste à charge lié à l’achat d’appareillages et à l’adaptation de logements et véhicules en faveur aux personnes en situation de handicap.
La décision régionale affecte déjà les bénéficiaires susceptibles de déposer des demandes cette année. « Il ne s’agit en aucun cas d’un changement décidé en catimini. La décision a été envisagée dès l’annonce de la restriction des financements de l’Etat en 2024. Il a été fait part de cette éventualité au niveau des services qui ne se sont pas engagés sur les dossiers 2025 », a de son côté expliqué le conseiller régional délégué en charge du handicap, de l'accessibilité universelle et de la promesse républicaine, Pierre Deniziot, lors de la commission. Ensuite, la décision de suppression de l’aide a été confirmée « par notre DGS en février 2025 par courrier aux présidents de la MDPH ».
Mauvais bilan
Mise en courant de cette coupe budgétaire au printemps via les commissions exécutives des Maisons départementales pour les personnes handicapées, APF France handicap a envoyé un courrier recommandé en juin à la Région pour alerter sur les conséquences de cette baisse. Mais elle n’a été reçue que ce vendredi par Pierre Deniziot à la Région.
>>> Sur le même sujet : Loi "handicap" : 20 ans après, une "promesse non tenue"
Alors que le sujet, au niveau politique, a déclenché une joute où la majorité et l’opposition se sont respectivement reproché leur mauvais bilan en matière de soutien aux personnes en situation de handicap, Liliane Morellec, représentante d’APF France Handicap pour l'Île-de-France, regrette l’absence de consultation des personnes concernées via leurs porte-parole. « Chacun se jette la pierre, tire la ficelle de son côté et nous on est au milieu, on est des petits pantins, on nous trimballe, sans nous concerter », déplore-t-elle. « On trouve la méthode un peu cavalière et non évaluée », souligne Patrice Giordano, responsable de l’engagement associatif et politique d’APF France Handicap Ile-de-France.
Manque d’évaluation
Pour l’association, l’argument de la Région, qui justifie entre autres sa décision par la prise en charge devenant intégrale des fauteuils roulants par l’Assurance maladie à partir du 1er décembre 2025 qui rendrait l’appui régional redondant, n’est pas recevable.
D’une part car les dossiers déposés en 2025 pourront se heurter à des refus et d’autre part car on manque de visibilité sur les effets de la future réforme. « La réforme des fauteuils roulants doit prendre effet, mais sachant tout ce qu’il va se passer sur le PLF et le PLFSS, on attend de voir, poursuit Patrice Giordano. Et même si cette réforme est bien mise en œuvre, elle va être suivie d’un toilettage des prestations de compensation du handicap, donc on s’inquiète quand même des restes à charge. »
Et alors que l’exécutif régional met en avant la seule question des fauteuils roulants, APF France Handicap rappelle aussi, s’appuyant sur deux rapports d’activité de MDPH, que les fauteuils représentent 20% des demandes en matière d’aides techniques, le reste étant composé d’aides non prises en charge par la Sécu, relatives à l’aménagement de logements, de véhicules ou à la communication alternative et améliorée. Un sujet qui aurait mérité, selon APF France Handicap, une évaluation afin de s’assurer que personne ne soit lésé.