Projet de loi ELAN : une discrimination à 10 ou 30 %, cela reste une discrimination

Cette notion d'appartement évolutif ne trompe personne : qui peut croire sérieusement qu'un bailleur privé n'écartera pas d'office le candidat locataire qui a besoin de travaux, même "simple", pour prendre accessible sont logement ?

Une Commission Mixte Paritaire composée de 7 sénateurs et de 7 députés va examiner ce mercredi 19 septembre le " projet de loi relatif à l'Évolution du Logement et à l'Aménagement Numérique " (ÉLAN) en vue d'aboutir à un texte commun aux deux assemblées parlementaires.

À cette occasion, nous tenons à réaffirmer notre opposition à l'article 18 de ce projet de loi qui prévoit de remplacer l'obligation d'accessibilité actuelle des appartements en construction 1 par un quota de 10 % (rédaction Assemblée Nationale conforme aux voeux du gouvernement) ou un quota de 30% (rédaction Sénat pour se donner bonne conscience), le reste devant être " évolutifs " c'est-à-dire que, selon le gouvernement, ils pourront être rendus accessibles aux moyens de " simples travaux " (cloisons amovibles, changement de la douche...).

Cette notion d'appartement évolutif ne trompe personne : qui peut croire sérieusement qu'un bailleur privé n'écartera pas d'office le candidat locataire qui a besoin de travaux, même " simples ", pour rendre accessible son logement ?

Cette mesure sonne comme une marche arrière de 43 années : la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 a posé le principe de l'obligation d'accessibilité des logements neufs en abandonnant le principe obsolète des quotas, puis la loi handicap du 11 février 2005 et ses textes d'application ont défini les normas actuelles. La loi ÉLAN réinstaurerait des quotas qui " auraient pour effet d'assigner une partie de la population à des lieux non choisis ", comme le dénonce le CNCPH (Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées).

L'accessibilité a peut-être un coût, au demeurant marginal devant celui des contraintes liées aux autres normes et au prix du foncier, mais la non-accessibilité a un coût social, et ce coût social est considérable ! Régulièrement, la presse locale se fait l'écho de situations dramatiques, par exemple ce locataire HLM victime d'un AVC et cloitré chez lui depuis 2014 dans l'attente d'une hypothétique mutation vers un logement accessible correspondant à sa situation et à ses moyens financiers...

Le CDTHED (Comité pour le Droit au travail des Handicapés et l'Égalité des Droits) ne saurait souscrire à un pitoyable marchandage destiné à fixer un quota de discrimination de 10 ou de 30%. Il dénonce un projet soutenu essentiellement par les lobbys de l'immobilier privé et se prononce pour le retrait de toute disposition visant à remettre en cause les normes d'accessibilité actuelles.